« Aux Etats-Unis, les citoyens perçoivent à juste titre l’inflation comme une taxe sur leurs revenus »

« Aux Etats-Unis, les citoyens perçoivent à juste titre l’inflation comme une taxe sur leurs revenus »

Peu de crédit est accordé au président Joe Biden et à son équipe pour leur gestion de l’économie américaine. Conscient que l’élection présidentielle de 2024, comme la plupart des scrutins, sera déterminée par les conditions économiques ou les perceptions qui s’y rattachent, le président s’est lancé dans la campagne en répétant que « les Bidenomics portent leurs fruits ». Or, le message ne passe pas. Un sondage CBS/YouGov mené entre le 26 et le 28 juillet révèle un taux d’approbation de seulement 4 % en matière d’économie.

L’explication tient en un mot : inflation. Les citoyens américains perçoivent à juste titre l’inflation comme une taxe sur leurs revenus. Lorsque le chômage est faible et qu’ils parviennent à trouver du travail, ils attribuent leur bonne fortune à leurs qualités individuelles de sérieux et d’initiative, pas au gouvernement. Mais lorsque les prix augmentent au supermarché ou à la station-service, ils considèrent cela comme la faute de quelqu’un d’autre. Ce qui n’est pas absurde.

La question est alors de savoir à qui la faute. La réponse est d’autant plus complexe que la récente poussée d’inflation a des causes multiples. Cela n’exonère pas l’administration Biden : son « plan de sauvetage » de 1 900 milliards de dollars (1 771 milliards d’euros) annoncé le 20 janvier 2021, premier jour du mandat, a soutenu vigoureusement les dépenses. Trop vigoureusement, peut-on désormais affirmer avec le recul, si l’on y ajoute les deux plans de relance adoptés en 2020 par Trump en mars (2 200 milliards de dollars) et décembre (900 milliards de dollars). Le pouvoir d’achat supplémentaire offert aux ménages a certes renforcé leurs finances et évité de sérieuses difficultés, mais a dopé l’inflation.

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Car, dans le même temps, les perturbations sur les chaînes d’approvisionnement et les pénuries liées au Covid-19 ont empêché les entreprises de répondre à cet accroissement de la demande. Plus encore, la Réserve fédérale (Fed) n’a pas su agir de manière préventive. Elle a attendu mars 2022, alors que l’inflation mondiale atteignait près de 8 %, pour commencer à relever les taux d’intérêt. Les historiens expliqueront probablement cet échec de la Fed par sa tendance à observer les conditions économiques dans le rétroviseur : durant l’essentiel de la décennie précédente, le danger réel et immédiat était la déflation.

Ne pas apparaître panglossien

Il a fallu du temps – trop de temps – aux décideurs monétaires pour reconnaître que les circonstances avaient changé et réagir en conséquence. Par ailleurs, la politique monétaire est peu efficace pour contrer une inflation provoquée, même en partie, par des chocs d’offre négatifs. La Fed était fondée à redouter que des augmentations préventives des taux ne détériorent encore davantage les chaînes d’approvisionnement d’une économie encore fragile. Les Etats-Unis ont peut-être échoué en matière d’inflation, mais l’administration Biden n’est pas responsable des ruptures d’approvisionnement liées au Covid-19, ni de la réaction tardive de la Fed.

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By Eduardo Carmona

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