Dianne Feinstein, la « lionne du Sénat » américain, est morte

Dianne Feinstein est morte comme elle le souhaitait probablement. En fonctions. Monument de la vie politique américaine, la sénatrice de la Californie est décédée, jeudi 28 septembre, à son domicile de Washington, quelques heures après avoir travaillé avec le groupe démocrate à l’élaboration d’un compromis avec les républicains pour empêcher le shutdown, la fermeture des services du gouvernement fédéral le 1er octobre. Doyenne du Congrès, elle avait 90 ans et refusé de démissionner, malgré d’éprouvants problèmes de santé et d’acuité mentale, obscurcissant le bilan d’un demi-siècle de service public entre crises et tragédies.

La mort en plein mandat de la 302e membre du Sénat − depuis la fondation de la république américaine − a donné lieu à un hommage unanime de la classe politique. Les drapeaux ont été mis en berne au Congrès. Républicains et démocrates ont salué une pionnière dans l’avancée des femmes en politique. Née le 22 juin 1933, « DiFi » (son surnom) avait été la première femme maire de San Francisco (1978-1988) en Californie, la première à entrer à la commission judiciaire du Sénat (1993) et la première présidente de la commission spéciale sur le renseignement du Sénat (2009-2015).

Quelques heures avant sa mort, après un dernier vote peu avant 14 heures, elle avait reçu son ancienne collègue Jane Harman, élue comme elle en 1992, dite « l’année des femmes » pour le nombre d’entrantes au Congrès. Emue, Jane Harman a montré ce qui est probablement la dernière photo de la sénatrice de la Californie. On la voit debout, amaigrie, mais lunettes à la main, et parée de son habituelle rangée de perles : au travail. Vendredi matin, un bouquet de roses blanches a été posé sur son pupitre au Sénat. « En regardant ce bureau, nous comprenons ce que nous avons perdu », a exprimé Chuck Schumer, le chef de file démocrate à la chambre haute, son collègue de trente ans. « Les femmes sont aujourd’hui au nombre de 25 au Sénat, a-t-il souligné. Chacune d’entre elles le dira : elle s’est faite sur les épaules de Dianne Feinstein. »

Une ascension semée d’obstacles

Née Dianne Emiel Goldman, la sénatrice était un pur produit de San Francisco. Ses grands-parents étaient juifs polonais, du côté de son père, et juifs allemands et russes orthodoxes du côté de sa mère. Celle-ci, Betty Rosenburg, était une ancienne mannequin et infirmière. Elle avait épousé le chirurgien Leon Goldman, premier juif à enseigner à l’université de San Francisco. Souffrant de troubles neurologiques, la maman terrorisait ses trois filles. Dianne était l’aînée, sa mère la poursuivit un jour armée d’un couteau de cuisine. Des années plus tard, en 1962, Dianne Feinstein épousera elle-même en secondes noces un neurochirurgien, Bertram Feinstein, de vingt ans de plus qu’elle.

Il vous reste 75.34% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

You may also like...