Pendant des mois, après le Covid-19, Joe Biden s’est vanté d’être le président ayant le plus réduit le déficit budgétaire. Il est désormais celui qui l’a doublé, même si un artifice comptable permet de faire croire qu’il n’a augmenté « que » de 23 % cette année. Le Trésor américain a annoncé pour l’exercice clos le 30 septembre un déficit budgétaire officiel de 1 695 milliards de dollars (1 598 milliards d’euros), soit 6,3 % du produit intérieur brut (PIB), à comparer aux 1 375 milliards de 2022 (5,4 %).
Sauf que ces chiffres publiés vendredi 20 octobre ne correspondent pas à la réalité, en raison du programme d’annulation de la dette étudiante décidé en 2022 par Joe Biden, mais retoqué cet été par la Cour suprême. Ce projet avait conduit à une augmentation du déficit de 379 milliards en 2022, qui n’a plus lieu d’être : le vrai déficit n’a en fait été cette année-là que de 996 milliards de dollars. Mais plutôt que de corriger le chiffre de 2022, l’administration Biden a décidé d’enregistrer ces 379 milliards en recettes pour l’année 2023, ce qui réduit artificiellement le déficit de cette année.
Le New York Times démontait, vendredi soir, ce tour de passe-passe : « Ces effets des prêts étudiants ont modifié les chiffres du déficit pour 2022 et 2023. En les excluant, le déficit est passé à 2 000 milliards de dollars en 2023 contre environ 1 000 milliards de dollars en 2022. » « En excluant les effets comptables du plan Biden », le déficit « a effectivement doublé », confirme l’agence Bloomberg.
Cette évolution complique la tâche du président à un an de l’élection présidentielle. La hausse des taux à dix ans, qui ont franchi la barre des 5 % pour la première fois depuis juillet 2007, va renchérir la charge de la dette pour le Trésor américain. Les républicains, qui paralysent le Congrès par leurs déchirures internes, vont disposer d’arguments supplémentaires pour ne pas voter le plan d’aide de 105 milliards de dollars pour les alliés des Etats-Unis, dont 60 milliards pour l’Ukraine. De quoi relancer le débat sur la politique budgétaire, alors que le pays s’est trouvé au bord du défaut de paiement et de la fermeture de l’Etat fédéral.
Effet ciseaux
La dérive budgétaire consterne les économistes, alors que le pays connaît le plein-emploi et une croissance raisonnable supérieure à 2 %. « Observer cela dans une économie où le chômage est faible est vraiment stupéfiant. Il n’y a jamais eu quelque chose de pareil », déclarait, dès septembre, au Washington Post, Jason Furman, professeur à Harvard et ancien conseiller de Barack Obama.
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