L’acte est hautement symbolique. Diffusée en direct à la télévision publique du Venezuela, la cérémonie durant laquelle le nouvel ambassadeur de France, Emmanuel Pineda, a remis, mercredi 16 août, ses lettres de créances au président Nicolas Maduro, officialise la normalisation des relations entre les deux pays après une période de tension provoquée par la non-reconnaissance par Paris de la réélection du chef de l’Etat en 2018.
Ancien ambassadeur au Honduras, M. Pineda, a remis ses lettres au président puis les deux hommes ont échangé une longue poignée de mains, au palais présidentiel, avant de discuter brièvement, assis devant les caméras mais sans le son.
« Il y a une normalisation, oui. Ce sont des moments différents », estime Luis Angarita, professeur spécialiste des relations internationales à l’Université centrale du Venezuela (UCV).
La crise ukrainienne, élément clé
Dans le sillage de Washington, Paris n’avait pas reconnu la réélection de M. Maduro à un second mandat en 2018 et soutenait l’opposant Juan Guaido, qui s’était autoproclamé président par intérim. Cet épisode relève désormais du passé, l’opposition y ayant elle-même mis fin en début d’année.
« Il y avait déjà eu une reconnaissance [de Nicolas Maduro par Emmanuel Macron] lors de la rencontre » à Charm el-Cheikh (Egypte), en 2022, rappelle M. Angarita. Lors de cette rencontre filmée dans les couloirs de la COP27, M. Macron avait qualifié M. Maduro de « président ».
M. Angarita souligne que la crise ukrainienne est un élément clé : « Le monde doit diversifier ses sources [d’approvisionnement en pétrole] avec l’Afrique et l’Amérique. Le Venezuela, qui a les plus grandes réserves du monde, réintègre ainsi la géopolitique ! La France l’a compris. »
Paris a des « intérêts » dans le pays, précise M. Angarita, notant que le groupe pétrolier français Maurel & Prom s’est positionné au Venezuela.
La Colombie effectue la même démarche
Emmanuel Pineda remplace Romain Nadal, très populaire au Venezuela, notamment sur les réseaux sociaux, qui était en poste depuis 2017. La longévité de M. Nadal, nommé en Argentine, s’explique entre autres par des finesses diplomatiques.
Le Monde Application
La Matinale du Monde
Chaque matin, retrouvez notre sélection de 20 articles à ne pas manquer
Télécharger l’application
« L’Europe était enfermée dans le jeu de la reconnaissance ou non de Maduro », selon M. Angarita. Remettre des lettres de créance aurait été une reconnaissance. Ne pas changer d’ambassadeur permettait « de garder le même statut », d’avoir un « ambassadeur et non un chargé d’affaires ».
M. Maduro a aussi reçu les lettres de créance du nouvel ambassadeur colombien, Milton Rengifo, qui succède à Armando Benedetti. Les deux pays voisins ont renoué en 2022 leurs relations rompues en 2019 également dans le cadre de la crise politique vénézuélienne.