L’affaire du baiser forcé indigne toujours l’Espagne. Le pays des conquêtes féministes continue de s’insurger contre le geste du président de la Fédération royale espagnole de football (RFEF), Luis Rubiales, qui, lors de la cérémonie de remise des médailles du Mondial de football féminin, remporté par la Roja le 20 août, a embrassé de force l’attaquante Jenni Hermoso.
En complet décalage avec les acquis de ces dernières années en matière de violences faites aux femmes, le scandale Rubiales a provoqué un séisme au sein de la société espagnole. « C’est terminé », « Ce n’est pas un “bisou”, c’est une agression », « Jenni, on est avec toi ». Elles étaient des milliers de femmes à scander ces slogans place de Callao, dans le centre de Madrid, lundi 28 août. Une marée violette, couleur devenue celle des luttes féministes, pour réclamer une nouvelle fois la démission du dirigeant.
Le gouvernement socialiste sortant a dû intervenir. La ministre du travail, Yolanda Diaz, a dénoncé « le machisme structurel des organisations sportives ». Son collègue des sports, Miquel Iceta, a enfoncé le clou : « C’est terminé, il n’y aura plus aucune discrimination envers les femmes » après cette « forte mobilisation sociale ».
Le parquet espagnol a annoncé l’ouverture d’une enquête pour « agression sexuelle » présumée. La Fédération a réclamé, lundi, la « démission immédiate » de son président, déjà suspendu par la Fédération internationale pour quatre-vingt-dix jours, jugeant que les derniers événements et « comportements inacceptables » ont « gravement porté atteinte à l’image du football espagnol ». Luis Rubiales maintient, lui, que le baiser était consenti, une affirmation démentie catégoriquement par la joueuse qui a dit s’être sentie « vulnérable et victime d’une agression (…) sans aucun consentement de [sa] part ».
Le feuilleton Rubiales a connu un nouveau rebondissement lorsque la mère de celui-ci, Angeles Béjar, a décidé d’entamer une grève de la faim pour demander qu’une solution soit trouvée. « Je serai là aussi longtemps que mon corps tiendra. Je n’arrêterai pas jusqu’à ce que Jenni [Hermoso] dise la vérité. Cela ne me dérange pas de mourir pour la justice. Mon fils est une personne honnête », a-t-elle déclaré à la chaîne de télévision Telecinco, mardi 29 août, depuis une église de Motril (Andalousie), où elle s’est enfermée.
« Le scandale a dépassé le monde du foot »
Plus que le baiser forcé, « ce qui a vraiment scandalisé les Espagnols, c’est l’attitude de Rubiales. Il s’est dit victime d’un “faux féminisme” alors qu’il est le symbole d’un machisme qui ne se rend même pas compte qu’il n’a plus sa place dans la société », explique Irune Aguirrezabal, spécialiste des questions de genre et autrice d’une étude sur la démocratie paritaire en Amérique latine (éditions Marcial Pons, non traduit). « Si l’Espagne n’avait pas gagné la Coupe du monde, le geste de Rubiales serait peut-être passé inaperçu. C’est parce que le scandale a dépassé le monde du foot que les joueuses ont finalement pu s’exprimer librement », assure Antonio Aguiar, directeur du média sportif numérique Iusport.
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