L’Uruguay, en pleine sécheresse, fait boire de l’eau salée à sa population

A la fin du mois d’avril, José Miguel, un retraité de Montevideo – la capitale de l’Uruguay –, s’est préparé un café avec l’eau du robinet. Il l’a repoussé dès la première gorgée : imbuvable. « J’ai couru acheter de l’eau minérale, puis un filtre valant 350 dollars [320 euros]. C’est un investissement », rapporte cet habitant « en colère » contre le gouvernement. Il n’est pas le seul à se détourner depuis des semaines de l’eau courante, tandis que le pays traverse cette année la crise hydrique la plus grave de son histoire.

« Entre 2020 et 2022, on a enregistré le même niveau de précipitations que celui de deux années normales, soit 2 450 millimètres dans Montevideo et sa région en trois ans », relève Raul Viñas, météorologue et membre de l’ONG environnementale Movimiento por un Uruguay Sustentable (« mouvement pour un Uruguay durable » – Movus). Il s’agit de la sécheresse la plus sévère vécue par le pays, sous l’effet combiné de l’épisode naturel La Niña – se traduisant dans cette région du monde par un déficit de précipitations – et du dérèglement climatique. Faute de pluie, les sources approvisionnant Montevideo et sa région, un territoire qui abrite environ 60 % de la population de ce pays de 3,4 millions d’habitants, atteignent un niveau historiquement bas.

Pour ne pas être confronté à des robinets à sec, l’OSE (Obras Sanitarias del Estado, la société publique de distribution d’eau) a trouvé cette solution en avril : mélanger le peu de réserve restante à de l’eau provenant de l’estuaire, le Rio de La Plata, salée en raison de la proximité de l’océan Atlantique. « Or nous n’avons pas l’infrastructure nécessaire pour la potabilisation d’une eau salée », relève Daniel Greif, ingénieur et responsable de la gestion de l’eau au sein du gouvernement précédent, dirigé par la gauche, entre 2015 et 2020.

« Dégoûtant »

Ainsi, le 5 mai, OSE a approuvé officiellement la modification des niveaux limites de sodium et de chlorure initialement prévus dans la norme, soit respectivement 440 milligrammes par litre (contre 200 mg/l à l’origine) et 720 milligrammes par litre (contre 250 mg/l). Une mesure prise avec l’aval du gouvernement du président, Luis Lacalle Pou (centre droit). Résultat, dans le verre d’eau des Uruguayens : un goût salé prononcé, souvent décrit comme « dégoûtant ».

Face à l’inquiétude des habitants, le gouvernement assure alors que l’eau reste propre à la consommation. Cependant, le ministère de la santé déconseille son ingestion aux personnes souffrant de maladie rénale chronique, d’hypertension, d’insuffisance cardiaque, de cirrhose et aux femmes enceintes.

Il vous reste 67.22% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

You may also like...