« Il n’y aura pas d’impôt JO », a assuré le président de la République, Emmanuel Macron. Il n’y aura, en tout cas, pas d’impôts pour les JO. L’accueil en France, à l’été 2024, des Jeux olympiques (JO) est synonyme de mesures d’exemption fiscale pour les organisateurs de l’événement – et pour les structures et les personnes proches de l’organisation.
Il est toutefois difficile de connaître exactement l’impact sur les caisses publiques de ces dérogations, qui sont une condition imposée par le Comité international olympique (CIO), mais qui, plus largement, valent aussi, depuis 2014, pour les grands événements sportifs internationaux (GESI) organisés en France.
Aucun chiffre spécifique aux JO ne figure dans le projet de loi de finances pour 2024, année des Jeux, dont les députés commencent l’examen mardi 10 octobre en commission des finances. Au ministère des sports et des Jeux olympiques et paralympiques, on dit ne pas disposer d’un chiffre global de l’effet JO dû à ces dépenses fiscales, comme on les appelle. Interrogé également, le ministère du budget n’a pas donné suite.
Selon les experts budgétaires gouvernementaux, l’impact de ces ristournes fiscales serait néanmoins restreint par rapport aux recettes que généreront les Jeux. Ils ajoutent que cette disposition, qui date de 2014, en faveur des organisateurs des grands événements sportifs internationaux, a d’ailleurs été créée parce que l’accueil de ces derniers génère plus de recettes que de pertes de recettes pour l’Etat.
Exonérations sur les royalties versées au CIO
Les documents associés au projet de loi de finances pour 2024 fournissent des chiffres globaux sur les dépenses fiscales de la « mission sport », notamment celles qui concernent les « organismes et leurs filiales chargés de l’organisation en France » de manifestations sportives comme les GESI, parmi lesquels se classent les JO.
Le manque à gagner pour le budget de l’Etat du fait des exonérations des bénéfices et revenus réalisés en France par ces GESI est évalué à 14 millions d’euros pour 2023 et 2024, contre 4 millions en 2022, quand celui lié aux exonérations des retenues à la source sur leurs bénéfices et revenus est chiffré à 1 million d’euros, comme en 2023 et en 2022. Dans les deux cas, aucune précision n’est donnée quant à la part qui concerne la sphère JO. Pas plus qu’à celle qui revient à la Coupe du monde de rugby, en cours.
De la même façon, ni le Mondial de rugby ni les Jeux ne sont isolés dans les 56 millions d’euros en 2023 et 60 millions d’euros en 2024 (contre 60 millions en 2022) de pertes fiscales dues au taux réduit de TVA à 5,5 % appliqué à la billetterie des manifestations sportives.
Une chose est sûre : le Comité d’organisation des Jeux olympiques et paralympiques (Cojop) n’est pas concerné par les exonérations sur l’impôt sur les sociétés et sur les impôts et taxes liés aux rémunérations versées à ses salariés. En effet, la structure, qui prévoit 4,38 milliards d’euros de recettes, ne devrait pas dégager de bénéfices et, non soumise aux impôts commerciaux, elle n’est pas redevable de la taxe sur les salaires.
Pour l’Etat, le manque à gagner fiscal lié aux JO proviendrait essentiellement de l’exonération de retenue à la source pour les royalties versées au CIO par le Cojop sur ses revenus de partenariats et de la non-imposition du chronométreur officiel des Jeux, l’horloger suisse Omega, sur les rémunérations perçues du Cojop. C’est ce qu’avait rappelé un rapport (dit « jaune budgétaire ») relatif à l’effort financier public dans le domaine du sport, publié en octobre 2022, qui chiffrait ces pertes de rentrées fiscales à respectivement 3,25 millions d’euros et environ 4 millions d’euros.
82 millions d’euros de dépenses fiscales pour la mission sport
Dans le projet de loi de finances pour 2024, le montant des pertes de recettes fiscales figurant au regard de la mission sport est évalué à 82 millions d’euros, contre 78 millions attendus en 2023 et 72 millions en 2022. La principale source de manque à gagner est le taux réduit de TVA à 5,5 % appliqué à la billetterie des manifestations sportives. Outre les exonérations sur les bénéfices et les revenus et sur les retenues à la source appliquées aux organisateurs de grands événements sportifs internationaux, 7 millions d’euros s’évaporeront en 2024 (comme en 2023 et 2022) du fait de l’exonération des sommes perçues par les arbitres et les juges. Le coût de l’étalement sur quatre ans de l’imposition du montant des primes versées par l’Etat aux médaillés aux Jeux olympiques et paralympiques et à leur guide n’est pas chiffré pour 2024.
Les collectivités locales affectées également
Le régime d’exception fiscale dont bénéficient les organisateurs des JO n’affecte toutefois pas seulement le budget de l’Etat, mais aussi les collectivités locales. Dans leur cas, la principale source de perte est la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, comme le relevait le « jaune budgétaire » de fin 2022.
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Si ce document ne chiffrait pas cette perte, il assurait qu’elle « sera très inférieure aux recettes fiscales additionnelles générées par l’événement ». Une affirmation également portée à propos de l’ensemble des exonérations dont bénéficieront les JO, les rentrées fiscales supplémentaires dues aux Jeux étant évaluées entre 400 et 600 millions d’euros.
A titre de comparaison – même si la dimension des deux événements n’est pas comparable –, l’accueil de l’Euro de football en 2016 s’était traduit par une perte de recettes fiscales de 65,1 millions d’euros, selon les chiffres gouvernementaux.
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